mercredi 14 octobre 2020

 Un dérive torique ... la suite

revenons un peu sur notre dérive. Elle est encore un peu courte, même si elle présente deux avantages : un profil adapté à l'amure et une position de la dérive au bon endroit du bateau lorsqu'il gîte.


Rajout de foils

Dans un premier temps nous allons rajouter des foils, pardon des ails-marines. Voici comment les construire.

Toujours à partir de notre profil, celui de la dérive, nous réalisons une extrusion linéaire en réduisant l'échelle.


L'extrusion linéaire sous Blockscad permet de réduire l'échelle pour faire un profil qui part en pointe. Pas de torsion dans notre cas mais cela est possible.

Maintenant, nous allons les positionner sur la dérive.

Quelques de translations et symétries et voici nos foils prêts à être monter sur la dérive.



Les raccords de foils

Toujours notre profil, mais cette fois nous allons le faire tourner (extrusion circulaire) dans l'autre sens. 

 
Le programme est simple avec une extrusion circulaire et deux cubes pour ne garder qu'un seul quart.

il faudra faire un autre raccord pour l'autre foil.


Pas de difficulté, la plupart des paramètres ne sont pas anticipés mais seulement le fruit de différents essais ;-)

La dérive complète

Et voici notre dérive complète. Pour une telle forme il va nous falloir un MOF en ébénisterie de marine !


Mais ce n'est pas terminé. En effet, une fois fabriqué, la dérive ne peut plus être insérer dans le puit de dérive : elle n'est plus circulaire. Donc nous devons en faire deux dérives.

Le code suivant coupe la dérive complète en deux parties que nous pourront ainsi insérer indépendamment dans chaque puit.



Et voici une image de la dérive sous le vent abaissée.




et la version vent arrière.


Bien sûr, il faut encore avoir moins de jeu entre la coque et la dérive mais le concept est là.

dimanche 11 octobre 2020

Une dérive  torique

J'ai toujours été surpris du manque d'évolution dans les dérives des dériveurs : le concept n'a pas bougé depuis ... longtemps alors que c'est un élément essentiel de nos coques.

Le profil d'une dérive actuel ressemble à une planche ; lorsque le bateau gîte elle ne sert quasiment à rien saut à resaler le bateau une fois à 90°.

Voici un axe de réflexion.



Voici un rouge notre coque de bateau. Uniquement le fond est représenté mais je connais votre imagination et il vous suffit d'ajouter quelques planches rouges pour avoir un magnifiques Vaurien, ou une Caravelle  ou un galion.

En vert, le (enfin les) puit de dérive.

En jaune, la dérive.


Voyons un peu notre dérive à l'action. Elle est toujours tenu par les deux parties du puits de dérive. Les puits et la dérive étant sur une forme torique (circulaire en 3D), cela peut coulisser.



Cerise sur le gâteau, le profil de la dérive est adapté l'amure.


On peut désormais avoir un profil adapté sur chaque coté et abandonner notre profil symétrique moins efficace.

Maintenant un peu de BloskScad pour arriver à tout cela. Dans un premier temps, voyons notre profil de dérive.

Le profil


Une fonction de Béziers avec les bons paramètres. A ce stade, pas de calcul hydrodynamique de la forme, ce sera pour une autre fois car elle dépend du bateau, de sa vitesse de son poids.

Pour la fonction de Béziers, un autre Post est disponible.

La dérive

Une fois que le profil est fait, la programmation est assez simple.


Une extrusion circulaire sur le profil et une soustraction pour n'avoir qu'un demi-cercle.

Notez cependant, cela m'a pris un peu de temps de réglage, le bloc "translation" entouré de jaune sur l'image associé à la rotation circonscrite. Elle permet d'avoir ce tore avec le profile initial.


Le puits de dérive

Le puits de dérive part aussi du profil creux et y ajoute une échelle.



Nous voyons sur le schéma le principe. En fait le puits est une dérive à une échelle un peu supérieur et avec des cube en soustraction pour supprimer les parties non désirées.

Le cube violet a été sorti du programme pour illustrer le principe.

et voici nos deux puits définitis.


Et voila le puits et sa dérive


Le (bout) de coque


deux plaques un peu inclinées et en soustraction le profil. La difficulté est que le profil est creux donc il reste de la matière au milieu. Je n'ai pas encore trouvé comment remplir un profil, surtout s'il n'est pas convexe. 

En effet, la fonction HULL qui permet de remplir rend les surface convexes ... ce qui nous arrange pas pour notre profil. 


En conclusion

l'histoire de la dérive n'est pas finie car on doit pouvoir faire encore quelques améliorations à ce premier jet. J'ai quand même une pensée émue pour le charpentier de marine qui devrait réaliser un tel système sans imprimante 3D ;-)





 

samedi 2 mai 2020

BlockScad : polynômes de Lagrange

Nous avons déjà présenté deux familles de courbes : celle de Bézier et celles de GrandPierre. Ces courbes sont pratiques et donnent de nombreuses possibilités, cependant il est compliqué de trouver les bons paramètres lorsque l'on veut passer par des points connus.

Dans cet article nous allons préparer une courbe mathématiquement simple, c'est à dire polynomiale, qui passe par trois points connus, en utilisant les polynômes de Lagrange.(voir  https://fr.wikipedia.org/wiki/Interpolation_lagrangienne )

Dans Blockscad nos trois points seront représentés par six paramètres : (Ax,Az) ; (Bx,Bz) ; (Cx,Cz)

Tout d'abord, il nous faut écrire chacun des trois polynômes qui s'annulent pour deux des trois points.

La(i) = (i-Bx)(i-Cx) / (Ax-Bx)(Ax-Cx) On peut remarquer que pour i valant Bx ou Cx ce polynôme sera nul et pour x valant Ax, ce polynôme vaut 1.

Lb(i) = (i-Ax)(i-Cx) / (Bx-Ax)(Bx-Cx). idem ce polynôme est nul pour Ax et Cx

Lc(i) = (i-Ax)(i-Bx)/(Cx-Ax)(Cx-Bx). De la même façon ce polynôme est nul pour Ax et Bx.

Voyons cela sous BlockScad.


Maintenant, il convient d'additionner ces trois polynômes avec les bons coefficients. Comment sont calculés ces coefficients ?
Pour i=Ax, Lb et Lc sont nul et La vaut 1. Il suffit donc pour passer par Az de multiplier par Az. Et de même pour les autres.


Pour passer par quatre points, c'est un peu plus long mais c'est le même principe.

Reprenons, notre système de boucle et de translation pour faire la courbe correspondante. Ne pas oublier que la boucle commence à Ax et fini (par convention) à Cx. Il faudra donc veiller à ce que les trois points soit toujours dans l'ordre croissant des abcisses.




Il ne nous reste plus qu'à faire un petit essai pour voir si cela marche (et tout recommencer sinon, mais cela vous le voyez pas ;-)

En premier temps, dessinons trois points.


Et appliquons les coordonnées de ces trois points à notre polynôme de Lagrange.


Rapidement, passons à une courbe avec 4 points.


Nous avons créé les variables Dx et Dz et nous avons complété les formules de façon assez mécanique. Ne pas oublier de changer la boucle pour qu'elle finisse à Dx.

Nous rajoutons le point vert dans le dessin. Attentions, il faut décaler les points qui ne sont pas dans l'ordre.




Et pour terminer, mais sans explication car le principe est connu, la version à 5 points.




Et pour terminer cet article, voici la courbe qui passe par les précédents points et le point rouge.


Plus le nombre de points augmentent plus la courbe est censée être lissée.


mardi 28 avril 2020

Un bateau peut-il aller plus vite que le vent ?


Voici quelques éléments pour répondre à cette question, de plus en plus existentielle pour les marins avec l’arrivée des hydrofoils.

Avant de répondre, prenons la question à l'envers.


Pourquoi les bateaux seraient limités en vitesse par la vitesse du vent ?

A priori, il n’y a pas de relation immédiate puisque le vent ne pousse pas le bateau mais crée une force qui entraîne le bateau.
Du point de vue de la physique, tant que la force qui entraîne (c’est à dire celle du vent) est strictement supérieure à celle qui freine alors le bateau accélère, c’est à dire que sa vitesse augmente (définition de l’accélération).

Ainsi donc, la vitesse du vent ne crée pas la “vitesse du bateau” mais une force propulsive. Il n’y a donc pas de lien immédiat entre la vitesse du vent et la vitesse du bateau.

Oublions les forces de traînée

Les forces de traînée sont tellement difficiles à modéliser que nous allons les oublier. 

En effet, elles dépendent des formes du bateau, du poids, des vagues, de la texture du revêtement de la coque, de la texture des voiles. Donc de tellement d'éléments que la modélisation est impossible … en tous cas pour moi.

La limitation de l’angle du vent apparent

Rappel sur le vent apparent



Cependant, quand nous utilisons des voiles, le vent vu par le bateau est le vent apparent, c’est à dire le vent réel (celui qui nous décoiffe sur la plage) et le vent vitesse, celui généré par la vitesse du bateau. Un petit schéma.

Le vent réel en rouge. La vitesse du bateau en vert (trait fin) et donc le vent vitesse qui est un vecteur opposé de la vitesse. En combinant vectoriellement (c’est à dire en deux dimensions dans notre cas) les deux vecteurs nous avons le vent apparent en bleu.

Et la vitesse augmente …

Regardons ce que devient notre schéma lorsque la vitesse du bateau augmente.




Nous voyons aisément que l’angle entre l’axe du bateau et le vent apparent diminue. Or, nous savons que cet angle ne peut pas diminuer jusqu’à zéro. Avec des voiles, il y a une limite de remontée au vent que nous allons appeler ALPHA (c’est toujours plus chic de prendre des lettres grecques pour des angles !).

Vitesse maximale théorique



Donc, pour un vent réel donné, la vitesse du bateau ne pourra pas dépasser une valeur correspondant au fait que le vent apparent ne peut pas venir d’un angle inférieur à ALPHA.

Maintenant, il va falloir calculer la vitesse en fonction de ALPHA (angle avec le vent apparent) et BETA (angle avec le vent réel).



Maintenant, que nous avons posé le problème, ressortons de nos grimoires quelques formules de trigonométrie (et oui, il fallait écouter en cours !).

Pour aller pas à pas dans le raisonnement nous allons calculer les dimensions sur les axes concernant “Vr”.


Ne revenons pas sur ces formules car c’est la définition même de la notion de cosinus (cos) et sinus (sin).

Occupons nous maintenant de l’angle ALPHA.




Encore une définition, celle de la tangente : - tg (ALPHA) = AA / BB, c’est à dire le côté opposé de l’angle divisé par le côté adjacent (il y un signe moins car le vecteur est dans le sens non habituel).

Or nous venons de voir que “AA” est égale à -Vr*sin(BETA), nous en déduisons facilement que “BB” = Vr*sin(BETA)/tg(ALPHA).
Et nous avons aussi vu que “CC” = -Vr*cos(BETA).
Et comme nous voyons sur le schéma que Vmax = BB + CC, nous avons notre formule.
Vmax = -Vr*cos(BETA) + Vr*sin(BETA)/tg(ALPHA) ce qui donne en simplifiant :

Vmax = Vr * (-cos (BETA)+ sin(BETA)/tg ALPHA)

Et la vitesse du vent Apparent ?

Au point où nous en sommes, calculons la vitesse du vent apparent et nous aurons fini nos formules.


Notre vent apparent c’est la grosse flèche bleue. Pythagore va nous aider avec sa formule (⋀2 signifie au carré, notation empruntée à l’informatique et beaucoup plus pratique que celle des mathématiques) :
(VentAppMax)⋀2 = (Vr*sin(BETA)/tg(ALPHA) ) ⋀2 + Vr*sin(BETA) ⋀2 et par simplification :

VentAppMax = Vr * sin(BETA) * SQRT (1+ 1/tg(ALPHA) ⋀2 )

Bien sûr, cette formule peut permettre de calculer le vent réel à partir de l’anémomètre du bateau, si tenté que votre engin soit à la vitesse maximum théorique.

Ouf, la partie théorique est maintenant finie. Passons aux cas pratiques.

Quelques simulations avec les formules

Vitesse du bateau et du vent apparent 


Un premier tableau reprend la vitesse du bateau et celle du vent apparent pour un angle ALPHA fixe.


alpha =40
=-COS($A5*PI()/180)+(SIN($A5*PI()/180)/TAN($B$1*PI()/180))=SIN(A5*PI()/180)*SQRT(1+1/(POWER(TAN(B$1*PI()/180),2)))
Angle vent réel (BETA)Vitesse Bateau MaxVent Apparent Max
30-0.270.78
400.001.00
500.271.19
600.531.35
700.781.46
801.001.53
901.191.56
1001.351.53
1101.461.46
1201.531.35
1301.561.19
1401.531.00
1501.460.78
1601.350.53
1701.190.27
1801.000.00


Pour un angle maximal de remontée au vent de 40°, la vitesse maximale théorique est de 156% du vent réel. Regardez un peu le vent ressenti par l’équipage, c’est à dire le vent apparent : il n’est pas maximal avec la vitesse maximale théorique.

Peut-on aller à 2 fois, 3 fois la vitesse du vent ?


alpha =101520252830
=-COS($A5*PI()/180)+(SIN($A5*PI()/180)/TAN(B$1*PI()/180))
Angle vent réel (BETA)Vitesse Bateau MaxVitesse Bateau MaxVitesse Bateau MaxVitesse Bateau MaxVitesse Bateau MaxVitesse Bateau Max
301.971.000.510.210.070.00
402.881.631.000.610.440.35
503.702.221.461.000.800.68
604.412.731.881.361.131.00
704.993.162.241.671.431.29
805.413.502.531.941.681.53
905.673.732.752.141.881.73
1005.763.852.882.292.031.88
1105.673.852.922.362.111.97
1205.413.732.882.362.132.00
1304.993.502.752.292.081.97
1404.413.162.532.141.971.88
1503.702.732.241.941.811.73
1602.882.221.881.671.581.53
1701.971.631.461.361.311.29
1801.001.001.001.001.001.00

Et voici un tableau qui varie en ALPHA et en BETA. Que pouvons nous conclure? Pour aller (vitesse maximale théorique) à 2 fois la vitesse du vent, il faut que le bateau sache remonter à 30° au près serré. Et pour 4 fois la vitesse du vent, moins de 15°. Pas courant !

Passons maintenant à la VMG


Vous vous rappelez la VMG ? velocity made good, c’est à dire la capacité d’un bateau à aller à un point au vent (0° du vent réel) ou un point sous le vent (180° du vent réel) en schématisant un peu.


La VMG est donc simplement la projection de la vitesse du bateau sur l’axe de vent réel, ce qui correspond à la vitesse du bateau (vecteur vert) multiplié par le cosinus de l’angle (180-BETA).

Rappelons que cos(180-BETA) = - cos(BETA)

VMGmax = -Vr * cos (BETA) * (-cos (BETA)+ sin(BETA)/tg ALPHA)

Voyons un tableau qui calcule cette VMG

alpha =
30
40



Angle vent réel (BETA)
VMG
VMG



30
0.00
0.23
40
-0.27
0.00
50
-0.44
-0.17
60
-0.50
-0.27
70
-0.44
-0.27
80
-0.27
-0.17
90
0.00
0.00
100
0.33
0.23
110
0.67
0.50
120
1.00
0.77
130
1.27
1.00
140
1.44
1.17
150
1.50
1.27
160
1.44
1.27
170
1.27
1.17
180
1.00
1.00


Donc, pour remonter au vent, il faut être à 60° du vent réel et pour aller sous le vent à 150° du vent réel.
Hélas, ceci n’est valable que si vous êtes au près serré du point de vue du vent apparent.

Le calcul optimal des angles

Réalisons trois courbes avec cette VMG pour des angles ALPHA de 20° (0,34 radian), 30° (0,52 radian) et 40° (0,69 radian).

Nous voyons bien que la VMG est plus favorable si le bateau remonte très bien (ALPHA = 20°)

Maintenant nous pouvons réaliser la dérivée de ces fonctions pour connaitre les angles idéaux c'est à dire un peu moins approximatif que le tableau Excel précédent.

Le grapher d'Apple fait les calculs pour nous.


Prenons les deux valeurs ou les fonctions s'annulent disons 1 et 2,6, c'est à dire :
  • 1 radian donne 57 ° environ
  • 2,6 radian donne 150° environ, ce qui corrobore bien les précédents calculs. 

Pour ceux qui ont choisis Spécialité Maths, 
d(VMGmax)/dBeta = -Vr * (cos (BETA) * (sin (BETA)+ cos(BETA)/tg ALPHA)
+Vr * (-sin(BETA) * (-cos (BETA)+ sin(BETA)/tg ALPHA)

= -Vr *[2*cos (BETA) * (sin (BETA) + (sin(BETA)^2 - cos(BETA)^2)/Tg(ALPHA)]

A ce stade, il faut trouver les racines : finalement c'est bien un grapher :-)

Confrontation avec le réel

Une copie d'écran prise sur une vidéo de la coupe de l'America de 2021. La voile est totalement bordée : facile à voir, elle est au milieu du bateau. L'angle du bateau par rapport au vent est 193°-47° (193 est en bas à gauche et 47 en bas à droite ) c'est-à-dire 146° pas très loin de notre angle optimal de 150°.
Le rapport vitesse du bateau / vitesse du vent est de  42,4/11,6= 3,65 est vraiment excellent (peut être pour cela qu'ils ont gagné ;-)

Il est difficile de conclure car ce sont des vitesses instantanées tant pour le vent que pour le bateau mais cela donne une première idée.


La voile est bien moins bordée : on voit bien l'arrière sur la droite de l'image. L'angle est de 2338-015= 63° qui nouos rapproche des 57° du grapher pour un angle théorique de 20° de remontée au vent.


Une dernière image pour vos propres analyses.

Conclusion

Vous auriez, ou croiriez avoir le bateau ultime, char à glace, foiler, qui vous permettrait de tutoyer la vitesse maximale théorique, alors une bonne nouvelle : plus besoin de savoir régler votre engin puisque vous seriez toujours au près. Comme dirait Dame Ellen, on borde à donf !

Mais alors, faut-il aussi que les amoureux de glisse apprennent à faire du près serré et ne plus laisser ce talent uniquement aux besogneux de croisière ;-)

PS: une bonne âme pour vérifier les calculs ?